michael melvin

Embarré dans la friendzone

Il est de retour! Voici un texte de Michael Melvin!

 

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À travers l’ambiguïté des multiples codes de l’amour, les méandres tordus de la psychologie de la séduction, les catacombes aliénantes du flirt, le labyrinthe tortueux  et drainant de la drague; à travers cette interminable joute aux règles qui m’échappent telle une partie de football foisonnant excessivement de stratégies étourdissantes; à travers ceux cumulant les conquêtes, ne déployant que pour seul effort un mouvement latéral de pouce; à travers cette jungle, il y a Moi-même. Je suis l’innommable, la honte de la cruise, l’exemple du fail, le Serge de Cruising Bar, le gars qui ”l’a pas”, l’anti mâle alpha, le bêta bêta, le courtisan ranci, je suis le friendzoné.

Je suis le gars à qui toutes les femmes souhaitent le plus grand des bonheur mais dont aucune ne se porte volontaire pour le vivre à ses côtés. Je suis celui de qui l’on dit le plus grand bien mais à qui il manque ce ”je ne sais quoi”. Je suis celui que l’on qualifie du bout des lèvres de ”cute” mais jamais de ”chaud”.  Je suis l’oreille que l’on téléphone afin d’étaler de long en large une autre déception provoquée par un des ces gars qui n’avaient que pour seul intérêt l’évacuation des ses génitales parties.  Je suis l’ami gai pas gai.

Comme si je n’avais pas de sentiments, comme si mon coeur était neutre, comme si je n’avais pas de pénis, comme si au jeu de la bouteille, on retournait celle-ci lorsqu’elle me désignait, comme si dans une chaîne humaine de french, on me contournerait tout bonnement, sans explication ni pourquoi, il en est ainsi. On me voit, sans le dire, comme une sorte de dénaturation asexuée n’ayant pas de besoins affectifs et on assume que j’en vis bien, que je l’ai maintenant accepté. Je suis le gars qui reçoit une amicale accolade en se faisant dire le fraternel ”Toi, je t’aime d’amour” mais qui n’est pas une option dans la tête des femmes s’inventant des scénarios lascifs en s’assouvissant elles-mêmes de leurs doigts farfouilleurs dignes du virtuose galopant sur les touches de son piano. Pensent-elles que je suis insensible à ce trois secondes où j’ai conscience de leur corps contre le mien?  Ce bref contact constitue le fait saillant charnel de ma journée…

Non, je ne suis pas un bad boy enfourchant son cheval de fer sans casque, brillant de mille feux sous son blouson de cuir (Je sais, je verse dans le cliché mais je suis Moi-même devenu un cliché!!!). Je suis un garçon gentil que votre mère approuverait. Un gars qui prendrait soin de vous quotidiennement, attentionné, à l’écoute de vos besoins, qui ferait des efforts pour vous comprendre. Je ne m’estomperais pas une fois le don de semence effectué dont vous ne préserveriez que pour unique échantillon un amer souvenir. En fait, sans les tatouages, je suis ce que plusieurs demandent sur les profils de sites de rencontres, mais, à l’instar d’un joueur de quatrième trio, mon tour ne vient pas. Sont-ce vraiment les tatouages qui éblouissent? J’ai d’ailleurs songé à m’en faire faire un bien visible mais, ne vivant pas dans le déni, je sais que la cause de mon insuccès est plus profonde que de l’encre épidermiquement gravée …et je m’évanouis à la vue d’une aiguille. Vous l’ai-je dit, je ne suis pas un mâle alpha…

De toutes parts, on me conseille : des hommes, des femmes, ma famille, mes collègues, mon facteur, mon chien ayant développé une relation stable avec mon facteur.  Même ma grand-mère m’a donné à Noël un forfait dans un séminaire me permettant de développer mes habiletés masculines en me disant qu’ils offrent diverses séances outillant le pire des empotés, copulations garanties ou…cause perdue finie. Je reçois des tutoriels, des capsules de maîtres théoriques jedi tombeurs infaillibles, des inscriptions de congrès de gars qui pognent pas (Ça sent la testostérone fragile un regroupement de gars aux épaules molles et au regard fuyant vers le sol). Le film Don Juan DeMarco apparaît désormais dans mes suggestions sur Netchix. Les allusions fusent de partout et on me réforme sans pudeur ”Fais ci, fais ça, sois ceci, sois cela”. Mais je veux être Moi-même à la fin!!

N’est-ce pas d’ailleurs le but de la vie, être ce qu’on est fondamentalement? Il doit y avoir une Elle-même quelque part qui aimera mon Moi-même. Une Elle-même qui m’agripera par le collet pour me sortir de cette insipide friendzone aux murs beiges et qui me fera l’amour dans la coïtzone, celle pleine de miroirs fixés sur des murs écarlates, assortie d’un lit en forme de coeur. Nous bâtirons ensuite nos vies dans la lovezone et… en fait, il ne devrait pas y avoir de frontières entre ces zones. Ces démarcations illusoires restreignent, obstruent, isolent. J’aspire à coïter dans l’amour avec la femme qui sera aussi ma meilleure amie, dans une seule et même vaste zone. Un espace libre et ouvert que Toi-même et Moi-même définirons au gré de ce que nous voulons être, notre lovecoïtfriendzone.

 

Michael Melvin

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